Vous avez envie de découvrir le monde au plus proche des gens ?! De faire quelque chose qui vous dépasse ? Vous avez envie de vous lancer dans une mission humanitaire, mais vous n’avez pas encore sauté le pas ? De plus, partir seule vous fait peur ? Oulaaaa, ok, ça fait beaucoup de questions d’un coup. Reprenons.
Je vais vous partager ici une de mes expériences de vie. Une expérience humaine qui a changé ma vision de la vie, du voyage et des gens !
Cette aventure date de 2006, et cet article est prêt depuis très longtemps, mais la vie fait que des fois tu zappe certaines choses sans trop savoir pourquoi… Alors, pourquoi maintenant ? J’ai eu l’opportunité d’assister à l’avant-première du rêve qu’ont réalisé Loris et Alex : un film documentaire qui retrace leur voyage humanitaire dans 3 pays. Ce film est maintenant disponible sur youtube, voici le lien si vous ne l’avez pas vu.
Leur film a fait remonter tous ces souvenirs que j’avais pu enfouir (à cause de la vie quotidienne, du boulot, des difficultés rencontrées depuis, etc…); il m’a donc fait ressentir à nouveau les émotions de mon expérience personnelle, de cette mission humanitaire en Asie. Depuis, ça me colle à la peau. Voilà pourquoi je trouve le besoin de sortir cet article maintenant.
Réaliser une mission humanitaire en Asie
Quelques candidatures envoyées à des ONG françaises sur tous les continents. Je n’avais pas de préférence pour la destination. Je voulais simplement découvrir un pays, une culture, des gens et apporter mon aide, comme je peux. C’est finalement Soleasie, une toute petite ONG basée dans le nord de la Thaïlande qui m’a répondu en premier.
Par volonté, j’avais sélectionné uniquement des toutes petites structures. J’avais ce besoin de vouloir vraiment participer et de ne pas être “noyer” dans la masse d’une grosse ONG. De pouvoir voir rapidement les résultats de mes actions et de comprendre au mieux la réalité du terrain.
Soleasie est gérée par Jean-Christophe, un lyonnais formidable, parti en Thaïlande à la suite du tsunami, et n’est jamais rentré. Il vit depuis avec sa femme dans le joli village de Phan, dans la région de Chiang Rai. Les Thaïlandais vivent en famille. Ainsi la maison accueille les 3 soeurs et leurs familles respectives. Tous vivent ensemble et partagent le quotidien. Et moi j’ai eu cette chance inouïe de pouvoir vivre avec eux pendant plusieurs semaines.
J’ai d’ailleurs été accueillie comme jamais je n’ai pu l’être. Les premiers contacts sont formidables, on a le sentiment que leurs visages s’illuminent. L’hospitalité des Thaïlandais est sans pareil !
Mes missions sur place ont été diverses et toutes destinées à être en contact avec des enfants :
- Activités en garderie dans des endroits reculés (plus précisément, apporter un soutien aux tribus Akhas)
- Apprentissage de jeux et de l’anglais dans différentes écoles de la région
- Cours d’anglais pour des monks
- Animations à l’hôpital pour des enfants séropositifs
Tous ces enfants et adolescents manquent clairement de moyens : peu ou pas d’accès à l’eau potable, à l’école comme à la maison, des infrastructures basiques, une pauvreté importante dans les familles, certains gravement malades sans les bons accès aux soins. Pour autant ils gardent cet émerveillement dans les yeux… Et ça, ça vous cloue le bec !
1. Les garderies
La garderie qui m’a le plus marqué est celle de la tribu des Akhas. Reculée dans les montagnes, c’est déjà une expédition pour se rendre sur place, peu facilement accessible. Il a fallu demander au chef du village son accord avant que je puisse travailler avec les enfants. L’objectif était de leur faire rencontrer une étrangère qui pourrait leur apprendre de nouveaux jeux, leur parler un peu anglais. Ces enfants ont leur propre dialecte et doivent ainsi apprendre le thaïlandais ET l’anglais. Déjà, un vrai job pour eux. Alors nous avons joué, crée notre propre langage, dessiné, etc, en utilisant le matériel qu’ils avaient.
L’émotion m’envahi toujours quand je revois cet enfant. Il se faisait surnommé « pastèque » avec ses grosses joues (décidément les enfants ne sont pas tendres entre eux, quelque soit le pays). Assez peureux, il lui a fallu plus de temps avant qu’il ne me quitte plus. Enfant battu (malheureusement comme beaucoup), il cherchait sans doute du réconfort, dans tous les cas, ces moments passés ensemble sont à jamais gravés.
En mission humanitaire, nous n’avons pas le temps, ni la possibilité de nous attarder sur tout. Tout ne peut pas être réglé dans l’instant présent. Et surtout, il faut faire avec cette frustration. On parle de petits pas, de petits gestes, qui au fil du temps auront une grande importance. Mais les retombées ne viennent pas forcément de suite, pas comme vous aimeriez.
Laissez de côté VOTRE vision !
Un élément important doit être garder à l’esprit : il faut vraiment laisser votre éducation, culture et votre vision du monde à vous de côté. Ne venez pas imposer vos règles, vos envies, adaptez-vous d’abord, essayez de comprendre la culture du pays, le rapport au temps et sa gestion (cet élément est essentiel dans certains pays et il vous évitera de devenir fou car cela ne va pas aussi vite que vous aimeriez). Adaptez-vous au pays, aux gens avec qui vous vous trouvez, entendez et comprenez leurs problématiques. Cela vous évitera de perdre votre énergie sur des choses qui comptent pour vous mais ne comptent pas pour eux, cela vous permettra aussi de comprendre que tout ne peut pas être une priorité.
2. Les cours d’anglais pour jeunes monks
Durant cette mission humanitaire en Asie, mes heures auprès des jeunes monks (ces petits moines en devenir, en robe orange) ont été extraordinaires. J’ai été professeur d’anglais pour eux, avec une classe nombreuse (une quarantaine d’adolescents de 11 à 18 ans) mais silencieuse et à l’écoute. Le truc difficile en France !
Certains se débrouillaient déjà très bien. Et j’ai eu pendant de nombreuses années des échanges par lettres avec certains, suite à mon passage. Quel honneur et plaisir de voir que l’on peut contribuer à quelque chose qui nous dépasse, quelque chose de tout petit mais qui, pour nous, fait toute la différence ! Leur permettre de s’ouvrir au monde extérieur, d’apporter un éclairage différent, de répondre à leurs questions et curiosité sur mon pays, de leur donner envie de s’intéresser au monde entier, etc.
Bien sur, il y a toujours d’autres priorités, mais celles-ci étaient les priorités du directeur de cette école de Monks, qui tenait fortement à ce que l’on se focalise sur l’ouverture au monde. Il est important de travailler main dans la main avec les personnes sur place, ce sont elles qui sont le mieux placées pour vous dire ce qui est essentiel ou non, en fonction aussi de vos compétences et des besoins du moment.
3. Rencontres inoubliabl es à l’hôpital
L’hôpital a été un passage difficile, émotionnellement parlant. Rencontrer des enfants séropositifs, dans un contexte où tous les moyens ne sont pas à disposition, forcément ça sert le coeur. Malgré les difficultés qu’ils rencontrent, chaque enfant garde cette lueur dans les yeux, cet espoir et capacité à s’imaginer vraiment dans un monde meilleur. Et ça, croyez-moi, ça vous envahit.
A savoir
Il faut savoir que des adultes mal-intentionnés viennent dans le Nord et ces endroits reculés, cherchant à emmener avec eux des enfants en promettant aux parents une vie meilleure, une education pour ces derniers… Pour finalement finir dans des réseaux de prostitution plus au Sud, là où le touriste pervers se rend… Les parents ont l’espoir d’une vie meilleure… Alors, on fait ce que l’on peut pour empêcher cela, leur faire prendre conscience de la gravité de la situation pour leurs enfants. On essaie de faire barrage, mais cela n’est pas toujours évident.
Et puis quand un jeune homme ou une jeune fille envoyé en ville transfère l’argent gagné d’une sombre manière à toute sa famille, cela permet à sa famille de vivre. Alors, on a beau venir avec toutes nos valeurs, nos convictions, on est parfois débordé par ce système et on sait que l’on fait uniquement partie d’une très très (trop) longue chaine, qui peut-être un jour permettra de réduire, voire stopper cela.
Des croyances sont également très dures à casser, dans les régions plus reculées, les hommes séropositifs pensent qu’il faut faire l’amour à une jeune fille vierge pour se laver de la maladie… Ca vous semble fou ?! Cette croyance est particulièrement dangereuse, on en convient, et tout un travail est réalisé sur place par d’autres personnes pour éduquer, informer et stopper ce fléau.
Voyager seule ?
Après l’excitation du départ vient toutefois la peur, celle de partir pour la première fois toute seule. Pour rappel, j’avais 20 ans, j’avais beaucoup voyagé déjà mais toujours accompagnée. Cependant la motivation d’accomplir quelque chose de différent et d’unique remplissait tout mon coeur de courage et de bonheur. Carte d’embarquement en mains, voici mon plus lointain voyage solitaire. J’ai peur de ne pas pouvoir partager, de ne pas savoir me situer, ni retrouver mon chemin.
Plus grande ouverture à l’autre
Mais mes peurs se sont envolées à la minute où l’avion en fait de même. Je partage déjà le voyage avec un couple anglais, curieux d’en savoir plus sur ma mission. Je m’aperçois vite que finalement voyager seule nous rend bien plus accessible. Nous faisons bien d’avantage de rencontres car notre regard et notre coeur restent ouverts à l’inconnu. Aucun écran (humain) se trouve face à nous, nous rendant ainsi plus ouverte au monde et à ce qui nous entoure.
Arrivée à Bangkok, j’avais pris quelques jours d’avance sur le début de ma mission afin de pouvoir visiter la ville. Face à elle, on ne reste pas indifférent ! On l’aime ou on la déteste. Je l’ai adoré. J’ai tout aimé : du calme des temples, à l’agitation incessante des rues et du fleuve; des rencontres insolites aux odeurs et couleurs; du bruit des tuks-tuks aux lumières éblouissantes des centres commerciaux… Bangkok, majestueuse, tient chaque jour à nous surprendre.
Puis, direction la gare routière : un billet pour le Nord. Ce sera 10€ pour 10 heures de trajet en bus. J’aime les trajets en bus. On peut y voir le paysage et la vie quotidienne défilant sous nos yeux. Je me souviens parfaitement ne pas avoir réussi à dormir, trop attirée par tout ce qui défilait et cette envie de tout capter du regard. 10 heures de bus avec musique locale à fond, clips et paroles, malheureusement je ne sais toujours pas lire le Thaï, par contre je pourrai le chanter. 🙂
Vivre dans une petite ville en Thaïlande
Vivre dans une petite ville du Nord de la Thaïlande et partager la vie quotidienne de ses habitants, ça donne ça:
- S’entasser à 4 sur un scooter sans casque pour faire qqs kms. S’il pleut, no worries, le conducteur sort son parapluie et le tien en main tout en conduisant.
- Des trajets assise à l’arrière des pick up (pour une fois il est possible de profiter du paysage sans vitre, sans toit, sans ceinture de sécurité, libre comme le vent qui caresse notre visage.)
- Les achats au marché du village à 2-3heures du matin : les courses se font très tôt pour ensuite préparer à manger à ceux et celles qui partent travailler dans les champs.
- Planter le riz, le battre, aider et comprendre la dure labeur du travail des champs.
- Se coucher tôt, très tôt, vers 20h et se faire réveiller chaque matin à 5h par des paroles et de la musique retentissant à travers des mégaphones disposés dans le village.
- Manger par terre, avec les mains, Ahhhh qu’est-ce que j’ai aimé ça ! Et puis, il faut dire que la cuisine thaïlandaise est quand même une des meilleures du monde ! (Oui là, c’est sans discussion possible sur ce sujet:) )
Alors, on saute le pas ?
Tant d’années se sont écoulées depuis… J’ai du mal à y croire, tant les émotions et souvenirs restent intacts.Voici une des plus belles aventure humaine et une expérience unique de vie que j’ai vécue, sans doute une des plus enrichissante de ma vie.
En conclusion, j’ai envie de vous dire, vu de ma fenêtre uniquement, qu’il est important de garder en tête les élements suivants :
- Etrangers dans un pays, nous devons nous adapter et comprendre d’abord les besoins, les règles, le fonctionnement de celui-ci.
- Participer en aidant au mieux les locaux et organisations locales.
- Faire travailler le pays, plutôt que de ramener des fournitures de France ou d’ailleurs… Avoir une connaissance exacte du besoin et ne pas amener SA vision du monde et SES produits, mais bien faire travailler l’artisanat ou le commerce local.
- Dans le cas d’un don où vous venez avec une valise pleine, ayez pleinement connaissance des personnes à qui vous allez donner et assurez-vous que cela sera suffisant (afin d’éviter de vous retrouver dans une situation où au final tout le monde n’a pas pu avoir); faites plutôt des dons de vos jouets aux garderies où les enfants pourront donc les partager.
- Evitez de représenter l’homme ou la femme occidentale débarquant dans un pays où il/elle donne pour satisfaire son propre ego et son propre plaisir, avant celui qui a vraiment besoin. Peut-être que la personne a besoin d’eau potable et non pas de vieux jouets provenant de votre cave.
- Armez-vous de patience, posez des questions, intéressez-vous. Les choses ne vont pas au rythme que VOUS pensez. La relation au temps peut être totalement différente d’un pays à l’autre, gardez cela en tête.
- Choisissez plutôt des petites structures, associations, ONG, qui ont une excellente connaissance du terrain et des besoins importants. Vous aurez, ainsi, vraiment le sentiment de vivre des moments uniques.
Si d’aventure, vous avez vous aussi réaliser une mission humanitaire, je serai plus que ravie de pouvoir lire en commentaire votre expérience ! N’hésitez pas à partager !
Et bien sur, même près toutes ces années, je tiens du fond du coeur à remercier Jean-Christophe et sa famille pour leur confiance, leur bienveillance et tous ces moments de vie gravés à jamais que nous avons partagé. Merci Soleasie !!!
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7 Commentaire
Sandrine de BEAUFORT
14 juin 2019 at 18 h 38 minMerci d’avoir partager toutes ces expériences et émotions.
C’est très dur de savoir quels sont les réels organismes en terme de volontariat ! il y a tellement de sites qui vous VENDENT du pseudo volontariat touristique
Sandrine
Ornella
17 juin 2019 at 10 h 23 minMerci beaucoup Sandrine pour ce commentaire qui me touche beaucoup ! Oui il faut se méfier, dans cet univers, il n’y a malheureusement pas que du « bon », donc quand il y en a, faut en parler:)))
Sandrine de BEAUFORT
16 décembre 2019 at 21 h 44 minBonsoir Ornella,
Quelles sont les petites ONG que vous recommandez, que je pourrai consulter afin de préparer ma mission ?
Merci beaucoup
Sandrine
jebloguedoncjesuis
11 mars 2019 at 11 h 56 minJ’ai ADORE ton article !!!!
TRES TRES insipirant !
Du coup ça me donne envie d’en savoir davantage!
– Comment as tu trouvé les ONG ? recherche sur le net ? puis démarchage un par un
ou il y a un site « annuaire » genr eu peu comme workaway.
– tu étais logée? nourire ?
Je travaille au quotidien avec les enfants. J’aimerais aller apporter cette joie et ce savoir faire (spécialité arts manuels et audiovisuel) à l’autre bout du monde.
Ornella
12 mars 2019 at 20 h 30 minOh merci beaucoup!
Alors à l’époque oui, recherche sur le net et je suis tombée dessus par hasard, je n’ai pas utilisé d’annuaire ou d’agence.
J’étais logée et nourrie aussi.
Aurelie l'exploratrice
11 mars 2019 at 11 h 10 minMerci Ornella pour cet article ! J’ai adoré !
Ornella
12 mars 2019 at 20 h 28 minMerci beaucoup Aurélie!!!