Indonesie

Voyage à Sumatra hors des sentiers battus

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Immersion chez les Mentawai, découverte du clan Minangkabau et observation des orangs-outans à Bukit Lawang

Cela faisait 5 ans que je n’étais pas retournée en Indonésie (2018). Ce voyage à Sumatra, réalisé fin septembre/début octobre 2023, était ma reconnexion avec ce pays qui m’avait accueillie pour mon premier voyage en solo, à Bali, en 2014. 3 voyages, 3 expériences… La première, en solo, à Jakarta et Bali. La deuxième, en couple, à Bali, Nusa Penida, Yogyakarta et les Karimunjawa. Et la 3ème, en groupe, lors d’un voyage organisé par Rencontres au Bout du Monde, exclusivement sur l’île de Sumatra.

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Repartir en Indonésie, oui, mais je ne voulais pas retourner à Bali, ni aller dans des endroits trop touristiques. Les îles Mentawai me fascinaient, et notamment depuis l’article de Sara qui raconte son surf trip sur l’île de Sipura… Le circuit solidaire sur Sumatra de Rencontres au Bout du Monde, avec une immersion chez les Mentawai (île de Siberut), la découverte du clan Minangkabau et l’observation des orangs-outangs à Bukit Lawang (Sumatra du Nord) m’a tout de suite appelée. 22 jours Paris/Paris au plus proche des locaux et de la nature, incluant 2 treks dans la jungle : let’s gooooo !

Note : je recommande ce voyage aux personnes qui aiment les voyages variés, solidaires, hors des sentiers battus, qui privilégient l’expérience vécue au niveau de confort (de très rudimentaire à bon), et qui se sentent appelés par l’observation de cultures ou espèces qui sont, hélas, plutôt amenées à disparaitre qu’à se développer (je parle ici du peuple Mentawai vivant encore dans la jungle et des orangs-outans).

Etape 1 : Découverte du clan Minangkabau (Sumatra Occidental)

Maninjau et ses alentours

Au départ de Padang, capitale de Sumatra Occidental (« Sumatera Barat »), nous avons roulé presque 5h en direction du lac de Maninjau, niché dans un cratère de volcan, pour rejoindre le village Minangkabau du même nom. Pour descendre au bord du lac Maninjau, il faut emprunter la route aux 44 virages (« kelok »)… Mais la vue en contrebas sur le lac et les montagnes au loin, c’était magnifique et ça en valait la peine.

Là, nous avons séjourné dans une maison traditionnelle (« uma ») tenue par Nani. J’ai adoré cette partie du séjour pour la diversité et la beauté des paysages, les rizières, les animaux, les arbres fruitiers, ce lac à perte de vue, l’incroyable cuisine de notre hôte et le fait d’être en immersion au sein d’une culture que je ne connaissais pas du tout. Mention spéciale pour les 2 « sanitaires » pour 11 personnes et les « matelas » au sol pour dormir (pour les hommes) ! Ca crée du lien direct dans le voyage, c’est moi qui vous le dis !

Dans cette même région, j’ai particulièrement aimé :

  • le marché de Bukittinggi (il a lieu tous les jours, mais je vous conseille de vous y rendre le mercredi, qui est le plus gros jour)
  • la « vanilla farm » Jerigud farm & cafe tenue par un couple, Omay et Rina. Au-delà d’exporter leur production de vanille et produits dérivés de la vanille, ils proposent un concept « farm to table« . Il y a beaucoup d’amour qui émane de ce lieu, de cette famille, et ça se ressent dans chaque produit, chaque sourire, chaque moment. J’ai bien entendu ramené de la vanille 😉

La vallée d’Harau

La Vallée d’Harau est un peu plus touristique (toutes proportions gardées !), mais d’une beauté à couper le souffle, entre sa jungle, ses cascades et bassins pour se baigner, ses grottes… Notre guide pour une journée de randonnée (d’escalade ?! lol) s’appelle Huan et il a contribué à la magie de cette journée. Sa bonté, ses yeux doux et souriants, son énergie à travers la montagne et sa mission, dans son village, pour perpétuer les traditions Minangkabau (musique, culture, récits, histoire…).

A noter : les Minangkabau, que l’on retrouve principalement à Sumatra et en Malaisie, est la plus grande société matrilinéaire au monde. Les femmes sont propriétaires de la terre et des biens, et les transmettent à leurs filles. On sait que l’on est en pays Minangkabau grâce à l’architecture des toits des maisons, en forme de cornes de buffle, qui rappelle la victoire de ce peuple.

Etape 2 : Immersion chez les Mentawai sur l’île de Siberut puis séjour en bord de mer

J’ai passé 4 jours dans la jungle, sur l’île de Siberut, à 7h de ferry de Padang (le sud de l’île se trouve à 140 km de la capitale de la province), en immersion au sein du peuple Mentawai. L’île de Siberut est la plus grande de l’archipel des Mentawai, rattaché à la province de Sumatra Occidental.

Pour rejoindre la maison de notre hôte, il nous aura fallu, après le ferry, chausser nos bottes en caoutchouc (car le sol est très boueux et, en période de pluie, on peut avoir de l’eau au-dessus des genoux !), embarquer à bord d’une pirogue pour un trajet de 1h30, puis randonner pendant 1h. Notre groupe s’est scindé en 2 : nous étions 6 d’un côté et 5 de l’autre. Nous dormions à même le sol, dans de petites moustiquaires installées dans la pièce principale. Nous nous lavions dans la rivière, faisions nos besoins en pleine nature et suivions notre hôte dans ses activités du quotidien (pas énormes ! Le moment était davantage à la contemplation). J’aimerais vous laisser découvrir par vous-même ce qu’une immersion dans la jungle, avec les rares familles Mentawai qui y vivent encore, peut vous apporter, mais je souhaiterais partager avec vous un souvenir fort.

Notre hôte, Amanjano, est chaman. On distingue 2 sortes de chamans : « Sikerei » (chaman qui chante et orchestre les rituels) et « Simata » (chaman guérisseur, ce qui est le cas d’Amanjano). Il n’aime pas aller au village, se nourrit de ce qu’il trouve dans la jungle, vit seul avec sa femme (ses 2 fils ont choisi la vie moderne, comme beaucoup de la jeune génération de Mentawai), et reçoit chaque jour de la visite de ses « voisins » (qui, parfois, marchent 5h pour le voir). Il n’a pas l’eau courante ni l’électricité, vit avec le soleil et se lave dans la rivière.

Chaque soir, il nous posait des questions. Il choisissait les sujets et notre guide traduisait. J’aimerais vous partager une de ses questions.

La veille, nous lui avons montré nos habitations, nous lui avons partagé les surfaces et le prix de l’immobilier à sa demande. Il était choqué du prix vs la taille des logements, mais encore plus qu’on ne connaisse que rarement nos voisins…

Le lendemain soir, il nous a demandé : « Vous vivez dans des grandes villes, comment faites-vous pour faire pousser vos légumes et vous nourrir ? ». Cette innocence nous a tous marqués. Comme si, de l’exprimer oralement pour essayer d’expliquer notre mode de vie, cela venait créer une gêne, une dissonance, une absurdité même…

Cet homme de 63 ans, au corps musclé et à la sagesse issue de la nature, nous a fait le plus beau des cadeaux : celui de questionner un mode de vie que l’on accepte communément pour laisser entrer un autre possible et ne plus jamais l’oublier… Il n’y avait pas de jugement dans ses questions et nos échanges, seulement de la curiosité. Et je crois que c’est la base de tout.

Soyons un peu plus curieux envers l’autre et partons du principe qu’on ne sait pas et que notre avis n’a pas besoin d’être « le bon » à tout prix…

Après ce séjour dans la jungle, nous étions ravis de séjourner au bord de mer au sein de Rimba Ecolodge, au sud de Padang. 3 jours sur une grande plage de l’Océan Indien, bordée par la chaîne de montagne de Bukit Barisan, à lire, contempler les couchers de soleil, jouer aux cartes, randonner, se baigner dans une cascade et faire du snorkeling pour observer les poissons et, même, des tortues !! C’était notre dernière étape dans la province de Sumatra Occidental, avant de prendre notre vol pour Medan (Sumatra du Nord) et rejoindre Bukit Lawang.

Etape 3 : Observation des orangs-outans à Bukit Lawang

L’extension de mon voyage, sur 5 jours, m’a fait découvrir le nord de Sumatra, au départ de Medan. Après un peu plus de 3h de route, me voilà arrivée à Bukit Lawang, point de départ pour explorer le parc national Gunung Leuser avec un guide officiel (obligatoire pour entrer dans le parc). Après 15 jours en croisant à peine 6 Occidentaux, cela m’a fait bizarre de retrouver un tourisme plus important (pas non plus de masse !). Jojo, notre guide, et Dedi, son assistant guide, ont été merveilleux et nous avons vécu de très beaux moments, ensemble, dans la jungle.

En haute saison (juin à août), 400 à 500 personnes par jour entrent dans le parc national et les emplacements pour camper qui sont loués auprès des rangers ne suffisent pas ! En septembre-octobre, c’est le début de la basse saison et il y a en moyenne 90-100 personnes par jour dans le parc.

Les règles sont strictes et les précautions de mise : un guide devant, un assistant guide derrière le groupe. Dans la jungle, pas le droit de nourrir les animaux donc tout ce que nous consommons est ramassé dans des sacs et jeté plus tard. Pas le droit non plus de s’approcher à moins de 10 m des orangs-outans. Et d’autres encore.

Les orangs-outans (« homme de la forêt » en malais) sont de drôles de créatures, pas faciles à observer. Au-delà d’être une espèce protégée, que l’on ne trouve dans son habitat naturel que dans 2 endroits dans le monde : à Sumatra et à Bornéo (les 2 en Indonésie), plus j’en savais sur eux, et plus je me disais qu’être un orang-outang n’était pas facile (lol). Nous avons 96,4% de gènes en commun avec eux mais ils se comportent davantage comme un oiseau en danger que comme un humain ! Leur poids varie entre 40-50 kg pour une femelle (avec 3 fois plus de force qu’un humain) et 60-100 kg pour un mâle (avec 5 fois plus de force qu’un humain) mais ils vivent comme des oiseaux, dans les hauteurs des arbres. Ils font des nids pour siester et dormir qu’ils créent à chaque fois et ils parcourent chaque jour 5 à 6 km, comme s’ils devaient en permanence éviter un danger de mort. Ils n’ont pas de queue et, par conséquent, ne savent pas « voler » de branche en branche.

Pour se déplacer, ils utilisent leur poids pour faire fléchir les branches, testent la résistance de celle où ils veulent aller, puis, avec 2 de leurs bras (car leurs membres ressemblent plus à 4 bras qu’à 2 bras et 2 jambes !) ils s’accrochent et « dansent » dans les airs. Les regarde est apaisant, impressionnant. Ils ne poussent quasiment jamais de cri, sauf pour s’accoupler ou dans de rares cas, comme s’ils voulaient se faire petits et discrets… tout en ayant le poil long de couleur orange roux !

Pour l’histoire, les orangs-outangs étaient chassés pendant de nombreuses années sur Sumatra. Les chasseurs voulaient les bébés, pour qu’ils deviennent des animaux de compagnie. La seule façon de récupérer le petit était de tuer la mère… Un centre de réhabilitation et un feeding center ont été mis en place (ils ont fermé depuis) afin de protéger cette espèce et pouvoir la reconnecter progressivement à son habitat naturel sauvage. Le dernier recensement date de 2008 et on dénombrait 7000 orangs-outans à Sumatra. Le nombre actualisé serait plutôt autour de 10.000.

Nous en avons croisé d’autres dans leur habitat naturel (dans les cimes d’arbres) et vu 3 sortes de singes différents : long tail macaque, pig tail macaque et Thomas leaf monkey (le singe endémique de cette région de Sumatra). Nous avons aussi pu voir un oiseau endémique, et entendre son chant si spécial. C’est une sorte de toucan mais plus massif, avec un bec orange et non jaune. Pas de serpent à signaler. Par contre des sangsues (j’ai été mordue et j’ai saigné beaucoup au niveau de la jambe), des araignées, des fourmis géantes…

Le trek de 3 jours / 2 nuits dans la jungle prévoit un déplacement de 6h par jour en moyenne (incluant les pauses) et 2 nuits dans 2 campements sommaires proches d’une rivière. Nous avons marché sous le soleil le 1er jour, puis le temps s’est dégradé à 15h, pile à notre arrivée au campement ! Quand la pluie arrive dans la jungle c’est un déluge. Pluie torrentielle, cours d’eau qui monte, éclairs et tonnerre, ça faisait un peu peur ! Les abris sont « waterproof » à défaut d’être instagrammables ! Par chance, entre 2 énormes orages, nous avons pu nous « laver » (avec de gros guillemets) dans la rivière ! Au réveil, un arbre s’était abattu juste à côté du campement…

Le 3ème jour, c’est en rafting que nous sommes rentrés au village (= de grosses bouées attachées les unes aux autres en convoi avec un guide devant et un autre derrière, les sacs de voyage mis dans des sacs en plastique pour les protéger et c’est parti !). 20 min plus tard nous voilà comme des gosses, heureux, trempés, fatigués, sales (oui !!), mais avec des souvenirs plein la tête, de marche, d’animaux, de soirées à la chandelle, de parties sous tension de jeux de cartes LOL.

Ma recommandation : si vous voulez observer les orangs-outans dans leur habitat naturel pendant que c’est encore possible, privilégiez les treks sur 2, 3 ou même 5 jours avec un guide habilité (au début du parcours, on traverse une plantation d’hévéa et là, « tout le monde » peut prétendre vous « montrer des orangs-outans » puisque ce n’est pas encore l’entrée du parc national. Et dites-vous que peut-être vous n’en verrez pas (nous n’en avons finalement vu que la veille du trek et le 1er jour) : c’est le jeu ! Privilégiez une saison intermédiaire mais attention à la basse saison : les animaux n’aiment pas trop la pluie, il vous sera difficile de les voir, et les montées / descentes étaient hyper escarpées, les conditions de marche ne sont pas optimales.

Je vous laisse découvrir le séjour à Sumatra de Rencontres au Bout du Monde auquel j’ai participé. Si vous le choisissez, prenez l’extension Sumatra du Nord car, sincèrement, cette partie du voyage, encore très différente, vous fera vivre une expérience proche de la nature et des habitants (on a séjourné dans un homestay, chez Erna, et c’était très chouette de la rencontrer, elle, sa famille et ses initiatives pour le compost et le traitement des déchets).

Tout savoir sur le Tourisme équitable

L’ATES

L’ATES (Association pour le Tourisme Equitable et Solidaire) est un réseau professionnel d’acteurs et de
spécialistes du tourisme équitable et solidaire, créée en 2006, et composé de plus de 30 membres. C’est la référence du tourisme équitable et solidaire en France et dans le monde. Elle est le porte-parole d’un autre tourisme, basé sur les rencontres et l’échange avec les peuples, et les cultures du monde entier. L’ATES définit et délivre le Label Tourisme Équitable aux opérateurs sur une base de 57 critères en termes d’équité et de solidarité.

Rencontres au Bout du Monde

Rencontres au Bout du Monde, agence de voyage équitable 100% digitale, créée début 2000 (son fondateur, Patrick Wasserman était clairement un précurseur du concept de « digital nomad ») est un membre fondateur de l’ATES. RBM propose des séjours au plus proche des populations et de la nature, principalement en Asie, mais également en Europe, au Cap Vert, à Cuba et au Pérou.


Merci à mes co-voyageurs Anne-Catherine, Fabienne, Benjamin, Robin, Lisa, Jessy, Julie, Pierre, Chloé et Paul ; à mes guides Eru, Sarul, Jojo et Dedi ; et à Clémence et Patrick, de l’équipe de Rencontres au Bout du Monde pour leur confiance.

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1 commentaire

  • Répondre
    pascal
    12 janvier 2024 at 9 h 56 min

    merci pour ce récit , cela doit être super de voir évoluer les orangs outans en pleine nature, d’autant que leur habitat est détruit comme beaucoup d’autres espèces par l’homme.

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